Pochade politique
Une petite ville-état, qui s'étend de part et d'autre d'une rue unique. Son chef d'état refuse l'éventualité de perdre le pouvoir, à la prochaine échéance démocratique. Pour ce faire, il brise le vivre ensemble, en s'en prenant aux habitants du côté impair, qu'il livre à la vindicte du côté pair. La parole raciste se libère, discrimination et ségrégation se constitutionnalisent, les médias abêtissants se font complices et la guerre civile éclate.
Cette perversion de la démocratie a été et est à l'œuvre dans divers pays. On en voit même qui, au nom d'une nation fantasmée et d'un passé chimérique, accordent, par leurs suffrages, les pleins pouvoirs aux ennemis de leurs libertés. Face à de tels mécanismes et à la colère qui les rend possibles, en appeler à la raison ou à la morale nous semble bien vain. La raison ne convainc que les convaincus et la morale n'est qu'arrogance insupportable pour un désespéré.
Nous choisissons donc de traiter cette tragédie par la farce.
L'action se passe dans un petit café restaurant, tenu par un patron débonnaire, pour qui faire de la politique est incompatible avec le commerce. On y croise au début quelques habitués qui cohabitent gentiment : le copain du patron qui y passe ses journées de chômeur longue-durée, une dame encapuchonnée qui doit venir d'en face, un client un peu encombrant, féru de grandes chansons françaises, et une molosse, douce comme un agneau, qui ne supporte pas de rester seule.
Aucun ne peut échapper à la violence qu'exerce le pouvoir pour installer son autocratie : La dame est renvoyée "chez elle". La chienne, victime du délit de sale gueule, doit rester invisible. L'ami tourne collabo, le chanteur ne chante plus et devient chef de milice. Et un vieillard aux manières désuètes, qui, dans sa naïveté, a pris les premiers tirs pour une fête pyrotechnique, en est la première victime. Même notre brave patron finit par succomber à la violence, pour l'amour de sa chienne, et rentre en résistance.
Avertir en divertissant, telle est notre démarche et, nous l'espérons, le pouvoir de cette petite comédie.
Un petit café dans sa culotte -Texte :
Un petit café dans sa culotte - Texte.pdf
Une grande partie de la scène VII a été jouée lors des Rencontres à la Cartoucherie dans une mise en scène de Philippe Adrien.